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Chronique

Le degré zéro de l’intelligence en Algérie !

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« Les écoles de mathématiques et d’intelligence artificielle » ouvriront leurs portes à la rentrée prochaine, annonce le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique algérien, « en application des instructions présidentielles ».

Tous les Algériens et les parents des futurs étudiants dans ces filières d’excellence devraient se réjouir. Et pourtant, pour peu qu’on y réfléchisse deux minutes, on conviendrait très rapidement de l’inanité de ce genre de décisions.

Le genre même de qui fait régulièrement problème dans notre pays.

Donner à nos étudiants une formation de « qualité internationale » en intelligence témoigne d’une absence totale d’intelligence, de surcroît contraire aux intérêts nationaux.

Pourquoi cela ?

Réponse : Parce que comme d’habitude on pense en terme d’offre et pas en terme de demande.

Les gouvernants algériens qui se succèdent depuis des décennies construisent des ponts et oublient de construire les entreprises chargées de les entretenir.

Résultat ? En peu de temps, ponts, édifices publics, cités, routes, autoroutes, usines, barrages… se dégradent à grande vitesse et finissent par poser plus de problèmes que ceux que posaient leur absence. Sans compter la perte des moyens mobilisés pour les créer.

En Algérie, on oublie qu’il y a 3 budgets auxquels ont doit réfléchir avant même de donner le premier coup de pioche.

1.- Un budget qui finance la construction (investissement)

2.- Un budget de fonctionnement optimale de ce qui a été construit

3.- Un budget qui finance son entretien, y compris dans l’anticipation des pannes inévitables qu’il doit connaître avant même que les pièces défaillantes ne soient défaillantes et arrêtent le fonctionnement de ce qui a été construit. (Maintenance préventive, 5S… enfin tous les outils du lean, usine 4.0 etc.).

Naturellement, ces budgets sont précédés par deux budgets absolument nécessaires :

1.- Un budget en amont qui finance l’étude de marché qui permet de justifier la construction

2.- Un budget de recherche en aval qui permet de concevoir le produit nécessaire à la satisfaction du besoin ainsi identifié, mesuré, y compris dans l’anticipation de son évolution et de son remplacement.

Tous ces budgets doivent être réfléchis, concertés, programmés, articulés, délibérés avant même la dépense du premier sou. On peut placer cette démarche dans la logique générale de la gestion de projet.

Naturellement, tous ces financements sont révisables en continu et à échéances régulières de façon à ajuster de manière dynamique en cours de réalisation et de fonctionnement.

Dans tous ces financements, le budget de réalisation n’est pas le plus important. Construire au fond c’est facile. Faire fonctionner correctement, sans pannes, sans gaspiller, entretenir, faire évoluer et remplacer lorsque c’est absolument inévitable et sans que les services attendus soient interrompus, voilà qui est bien plus ardu et bien plus difficile.

C’est cela le développement !

C’est l’erreur de débutant que nous observons tous les jours dans notre pays depuis des décennies. Et nous refaisons avec entrain, incompétence et indécence politique les mêmes erreurs. Sans bilan et sans mémoire. C’est-à-dire sans grande intelligence et sans ens de la responsabilité.

On construit sans se demander à quels besoins exacts cela répond et sans se préoccuper de la bonne fin des réalisations et de leur devenir. Regardez autour de vous la dégradation des édifices publics laissés à l’abandon. Qui s’en préoccupe ?

C’est cela qui coûte cher à la nation, précisément au moment où elle a besoin de l’affectation intelligente et raisonnable du moindre centime dont les gouvernants et les citoyens sont comptables. Car nous sommes collectivement responsables de cette incurie, par-delà les responsabilités politiques évidentes de ceux qui administrent nos intérêts en notre nom à tous.

Mais quelle relation me direz-vous avec l’investissement dans l’intelligence ?

N’est-ce pas précisément ce dont nous avons le plus besoin aujourd’hui ? Des compétences de haut niveau pour le développement de nos universités, de nos entreprises et de notre économie ?

Là aussi la question des moyens est subordonnée à la question des objectifs et de leur planification raisonnée.

L’école, le collège, le lycée et l’université algérienne ont formés des centaines de milliers de jeunes. Bien plus que jamais le système colonial ne l’a fait en 132 ans d’occupation. On en reparlera des « bienfaits de la colonisation »…

Bien sûr, tous ne sont pas devenus des savants de renoms (quoi que…) ni obtenus de prix Nobel.

Mais dans l’ensemble leurs qualifications sont si élevées que beaucoup d’entre ces jeunes se sont expatriés et font le bonheur des universités, entreprises et hôpitaux en Europe et en Amérique du nord.

A l’occasion de cette crise épidémique, on a pu voir certains d’entre eux, plus nombreux qu’en proportion des populations qu’ils représentent, intervenir en compétence, avec autorité, à la télévision française à titre de spécialistes ou de chefs de service.

Certes, il n’y avait pas que des médecins ou biologistes algériens face au micros ou aux caméras. Car la pathologie que je dénonce ici n’est pas propre à notre pays. Il ne faut pas que cela se reproduise.

Il n’est pas concevable que les pays du sud continuent de former en mobilisant des moyens considérables et rares, des compétences qui finissent par être utilisées dans les pays du nord.

Et par dessus le marché, ils sont humiliés – qu’ils le veuillent ou non – lorsqu’il est question de sécurité, de différences cultuelles ou culturelles avec les slogans offensants qu’ils écoutent quand les médias et les politiques se déchaînent contre leurs semblables dont ils ne partagent pas les conditions économiques et sociales, ni n’approuvent les comportements, mais ils se sentent peu ou prou partie prenante, peu ou prou humiliés.

Alors ils observent en silence et ils se taisent… coincés. Le sud qui finance le nord, ce n’est pas, ce n’est plus acceptable !

Il n’est pas concevable que l’on continue à former des compétences de « niveau international » pour les voir partir, « rentabilisés », après leur formation à l’étranger, sans qu’aucun plan, aucun programme d’insertion professionnelle, aucune entreprise de très haut niveau, aucun laboratoire de pointe, n’ait été parallèlement prévus pour eux à l’issue de leur formation.

Avant même que l’on songe à créer ces filières.
Et ce qui est vrai de la formation est tout aussi vrai pour toute l’économie. Même les pays capitalistes purs et durs en viennent à la planification, même le FMI et la Banque Mondiale en prêchent les valeurs.
Un peu d’histoire: la toute première décision de l’ « Etat » Chadli a été la disparition du ministère de la planification et de l’aménagement du territoire que bien plus tard M. Rocard a défendu sous Mitterrand et a dirigé.

Autour de vous de nombreuses compétences algériennes de très haut niveau observent et déplorent leur sous-utilisation, le tragique d’entreprises, de laboratoires, d’administrations… qui gaspillent les moyens de la nation et l’incurie des responsables dépassés.

Je ne suis pas du bord de l’ancien patronat algérien -disons des années 2010-, pour aller vite.

Cependant, lorsqu’une parole intelligente s’exprime, il n’est pas correct de faire la sourde oreille sous de prétextes politiques tout compte fait fallacieux. Quels que soient les projets réels de leur auteur.

Je lisais début janvier dernier un article pertinent sur bien des points à propos de cette question. Je vous le joins en ce pli.

Avec mes salutations vespérales.

Djeha

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