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Liberté de la presse en France : des organisations dénoncent l’interpellation de journalistes à Roissy
Une cinquantaine d’organisations ont dénoncé ce vendredi 9 octobre de « graves menaces » sur la liberté d’informer en France après l’interpellation samedi d’une dizaine de journalistes couvrant une action de militants écologistes à l’aéroport de Roissy, ceux qui n’avaient pas de carte de presse ayant été placés en garde à vue.
« Arrêter des journalistes qui ne font que leur métier est inadmissible, les placer en garde à vue l’est encore davantage », s’indignent dans un communiqué les sociétés de journalistes de divers médias comme l’AFP, Médiapart ou Franceinfo.fr, aux côtés de syndicats (SNJ, CGT, CFDT…), sociétés civiles d’auteurs, agences, collectifs et organisations comme Amnesty International et la Ligue des droits de l’Homme (LDH).
Une centaine de militants étaient entrés samedi par effraction sur un tarmac de Roissy-Charles de Gaulle, près de Paris, avant d’être arrêtés par les forces de l’ordre, dans le cadre d’une journée d’action pour la réduction du trafic aérien.
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« La gendarmerie a procédé à l’interpellation d’une dizaine de journalistes » aux « alentours de 9H30 », selon les signataires du communiqué.
« Puis le groupe » a été « scindé en deux » : ceux qui avaient une carte de presse ont été entendus comme témoins avant d’être « libérés aux alentours de 13H », tandis que les autres ont été « placés en garde à vue et regroupés avec les autres militants » jusqu’au soir, expliquent-ils.
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« C’est un scandale » a jugé auprès de l’AFP Nicolas Bonnamy, opérateur de prise de vue travaillant sur un documentaire co-produit par Arte et la NHK, placé en garde à vue avec son assistant « jusqu’à minuit » malgré une « lettre de mission » et « un brassard presse ».
De même, en dépit d’une « attestation » de son collectif Hans Lucas, le photographe Raphaël Kessler a subi le même sort, une « première » après « pas mal d’actions » couvertes.
« Personne n’a été interpellé violemment, on a été vouvoyé jusqu’à la sortie », a toutefois souligné M. Bonnamy.
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Contacté par l’AFP, le parquet de Bobigny a confirmé « que parmi les dix personnes interpellées qui prétendaient être journalistes, les quatre qui ont été en mesure de présenter des cartes de presse ont été entendues librement ». Les six autres « ont été placés en garde à vue au même titre que l’ensemble des personnes ayant participé à la manifestation », a ajouté le parquet, précisant que « 98 » avaient été « libérées en fin de journée », à l’inverse « des cinq personnes identifiées » comme « leaders du mouvement ».
Reste que « la carte de presse n’est en aucun cas obligatoire à l’exercice du métier de journaliste », rappellent les signataires.
Cet épisode met en porte-à-faux le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Il avait assuré courant septembre qu’« on n’a jamais demandé une carte de presse pour être journaliste sur une manifestation », plaidant un « gros malentendu » face aux inquiétudes de la profession à propos du nouveau schéma national du maintien de l’ordre (SNMO), qui semble opérer une distinction similaire entre journalistes « encartés » et non « encartés ».
Des recours contre ce texte, déposés par la LDH, le SNJ et la CGT, doivent être examinés par le Conseil d’Etat le 16 octobre.