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Chronique

Moi Saïd, 60 ans, hirakiste en exil

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Mises à part quelques vitupérations enfiévrées sur Al Magharibiya, que mon fan club m’avait encouragé à reproduire, et quelques apparitions, gravées sur selfies, sur la place de la République à Paris, le reste de mon hirak s’est déroulé au chaud.

Aux premiers temps du hirak, je me suis même surpris à lancer, dans une griserie propre aux retransmissions de football, des “il faut aller plus loin” supposés s’adresser, par delà la mer, aux légions de marcheurs que je suivais, les yeux embués d’émotion, sur le téléviseur de mon salon. “Nous gagnerons, ça c’est certain!”, me rassurais-je devant une tasse de bonne verveine rapportée d’un précédent voyage au bled. En mon for intérieur, j’étais heureux d’avoir “prévu ça” dans une de mes analyses gardées sous le boisseau ; puis je me dépêchais de partager, sur les réseaux sociaux, mes projections “optimistes” sur les possibles répercussions de ce mouvement extraordinaire.

Chaque vendredi, je me jurais d’être présent à la prochaine éruption populaire et je regardais aussitôt les prix des billets Paris-Alger… Voilà 47 vendredis de rendez-vous manqués et je ne sais toujours pas quand Saïd, ci-devant grand admirateur du hirak, sera physiquement présent au milieu de ses frères et sœurs qui battront encore longtemps le pavé. Le hirakiste en exil est empli de certitudes et a un avis sur tout, que ne partagent pas forcément ses multitudes de suiveurs sur Facebook, son immense fierté ! 

Paraphrasant Chateaubriand, je crois que “l’exil est un naufrage” qui ne laisse aucun expatrié indemne. Cette valse incessante, une pensée ici et une autre là-bas, met le hirakiste en exil dans un état proche de la névrose : il vit son Algérie comme un objet de fantasme, si nébuleux. Une chose, redoutable : il craint de s’éloigner de son retour mille fois rêvé et tant de fois ajourné.

Mais, promis, j’irai marcher un vendredi à Alger ou dans une autre ville de mon pays que je chéris, à qui je souhaite des lendemains meilleurs, que j’encense ou déteste selon mon humeur ou la température de l’air ; où j’espère toujours lancer tel ou tel projet dans mon métier “de cœur”… En attendant, je braille dans le carré de mon salon : “Allez les jeunes, vous êtes notre fierté”. Toujours, au chaud ! 

Saïd Kaced

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