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Politique

Un dialogue pour sauver le système

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Le XVIème acte a été une autre occasion pour le mouvement populaire de montrer au pouvoir sourd que ses stratégies, ses ruses et ses menaces n’ont pas entamé sa détermination.

La mobilisation a en effet été massive après le léger tassement remarqué durant le mois de ramadan. Ceux qui ont misé sur l’usure et le pourrissement ont eu pour leurs frais. Les Algériens (nes), par millions, ont encore une fois haussé le ton face à un pouvoir en panne d’imagination et rejeté ses offres dérisoires. Les élections du 04 juillet ont été annulées grâce à la mobilisation populaire qui a empêché qu’elles se tiennent. Gaid Salah l’homme fort du moment y tenait pourtant comme à la prunelle de ses yeux. Au lieu de prendre acte de cet échec patent et agir afin de satisfaire les revendications de la rue, le chef de l’état-major de l’armée, tout en prônant le dialogue, tourne en rond en ne trouvant rien de mieux comme issue à la crise qu’une autre élection sous les mêmes auspices et sans aucun changement politique notable : une présidentielle à tenir dans les plus brefs délais. Cet empressement du pouvoir montre sa volonté de fermer le plus vite possible la parenthèse de la mobilisation populaire.

Le chef de l’état-major, puis le chef de l’Etat par intérim, qui n’en est plus un constitutionnellement parlant, ont beau s’égosiller à prôner un dialogue « constructif », personne, hormis leurs clientèles habituelles, ne leur accorde le moindre crédit. Le dialogue, dans un conflit de cette ampleur, est a priori quelque chose d’utile et un moyen de sortir de l’impasse. Cependant, une telle démarche exige des préalables et, dans notre cas précis, on ne voit aucune mesure d’apaisement poindre à l’horizon. Au contraire, le pouvoir profond continue à s’arc-bouter sur des positions dépassées par la rue et pas du tout à la hauteur des aspirations populaires. En effet, un dialogue sincère et constructif exige des mesures concrètes qui rendraient la démarche crédible.

Quel sens peut prendre cette invitation au dialogue quand on sait que les médias publics et privés inféodés au système sont hermétiques à tout débat contradictoire et fermés à l’opposition politique ? Aucun, sommes-nous tentés de répondre. Peut-on engager des discussions sérieuses sans la libération définitive et sans  conditions de tous les détenus d’opinion qui croupissent dans les geôles du système ? Ce n’est guère envisageable.

Les Algériens sont méfiants et récalcitrants à l’égard de toute initiative venant du pouvoir et ils ont raison. La suspicion est d’autant plus forte que le pouvoir en place mise sur la répression et multiplie les entraves à la liberté de manifestation et de circulation.

Comment parler de dialogue lorsque ses résultats sont fixés avant même le début du commencement de la discussion. Cette concertation doit, selon Gaid Salah, se limiter à la mise en place de la commission électorale qui sera chargée d’organiser la présidentielle. Le président élu aura alors la tâche de concrétiser les revendications du peuple. L’écart entre les revendications populaires et les pseudo-propositions du pouvoir est abyssal. Penser que le peuple mobilisé par millions depuis bientôt 5 mois rentrera au bercail comme si de rien n’était, c’est prendre des vessies pour des lanternes. Une mobilisation d’une telle ampleur ne peut être ignorée ou minimisée et la volonté du peuple doit être respectée.

 Pourquoi cet empressement et pourquoi une présidentielle ?

Le pouvoir qui a lâché Bouteflika afin de sauver le système et le pérenniser est constant dans sa démarche. Il s’efforce de rester sur la même dynamique en soufflant le chaud et le froid. Tantôt, on proclame sa sympathie pour le mouvement, tantôt on le décrie. Le peuple qui ne connaît que trop ce pouvoir autoritaire est resté, lui aussi, sur ses revendications de départ résumées par l’emblématique slogan « Yetnehaw Ga3 » qui n’est, dans sa traduction politique, qu’une exigence de rupture radicale avec le système et ses pratiques.

Aller hâtivement vers une présidentielle dans le climat politique actuel avec le même gouvernement, la même administration et un champ médiatique muselé, c’est tout simplement signer l’arrêt de mort du mouvement.

Le candidat du pouvoir ou soutenu par celui-ci aura de très fortes chances de gagner ces élections, car il est le seul à avoir les moyens et des clientèles grassement rémunérées, mais surtout la fraude pour gagner. Ainsi, le peu de légitimité qu’aura le nouveau président suffira à s’attaquer à la mobilisation. Si nous voulons changer le système, l’élection qu’il faut à tout prix éviter est la présidentielle. Le champ politique algérien est un véritable champ de ruines et l’émergence d’une autre classe politique jeune et débarrassée des vieux réflexes politiciens prendra du temps. C’est pour cela que le mouvement populaire doit avoir l’audace d’entamer le processus de son auto-organisation en encourageant toutes les initiatives qui naissent çà et là et permettre l’émergence d’une nouvelle classe politique soucieuse des intérêts politiques et économiques de la majorité des citoyens.

Dissoudre les partis de gouvernement et déclarer leurs responsables et élus inéligibles à vie.

Pour assainir le climat politique, le mouvement populaire doit exiger, comme autre préalable à un éventuel dialogue, l’interdiction de tous les partis politiques qui ont été à l’origine des différentes tragédies dont ont été victimes les populations depuis l’indépendance. On imagine mal comment, dans l’Algérie de demain, des partis comme le FLN, le RND, le MPA, TAJ et d’autres qui ont méprisé, pillé et humilié ce peuple peuvent continuer à exister. La rupture radicale doit se faire avec le système et ses pratiques, et les partis politiques, les organisations de masse et les associations qui ont participé au désastre national ne peuvent aspirer à un quelconque avenir.

La rue doit maintenir la pression sur le pouvoir et veiller à sauvegarder à tout prix son unité. Une unité qui doit respecter les différences de tout ordre et n’exclure personne et non un unicisme qui ignore des pans entiers de la société.

L’Assemblée constituante nous parait être l’alternative idéale à la volonté du pouvoir de nous imposer un simulacre d’élection qui n’a pour unique but que d’étouffer le mouvement et de le conduire vers une voie de garage. Une Assemblée constituante souveraine, élue à la proportionnelle intégrale pour que tous les courants de pensées et les classes populaires y soient représentés.

Cette voie est la seule à même de susciter un débat général et profond au sein de la société. Un débat qui conduira aux rapprochements nécessaires à l’élaboration d’une Constitution la plus démocratique possible et qui consacre des droits pour les classes populaires. Mais quels que soient les acquis que consacrera la nouvelle Constitution, la meilleure garantie pour une évolution vers une société juste et réellement démocratique reste, sans aucun doute, la mobilisation constante et permanente de la société.

C’est pour cela que cette mobilisation inédite et sans égale dans l’histoire récente de l’humanité doit contribuer à faire émerger des organisations syndicales indépendantes (travailleurs, étudiants et petits paysans), un mouvement associatif puissant et une classe politique crédible. C’est à ce prix que nous nous dirigerons vers une nouvelle société libérée des pesanteurs idéologiques régressives et débarrassée de toutes les injustices.

M. A.

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