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Gauche algérienne : Voie ouvrière pour le socialisme (VOS) est née

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La gauche algérienne vient d’enregistrer une nouvelle organisation politique se réclamant du combat de la classe ouvrière pour le socialisme et la société sans classe. Il s’agit de la Voie ouvrière pour le socialisme (VOS) dont nous reproduisons intégralement le texte de proclamation :

Le mouvement qui s’est déclenché dans notre pays, depuis le 22 février, se renforce et s’approfondit. Il a redonné espoir aux couches populaires et aux travailleurs. Son ampleur et son caractère politique ont ébranlé le régime qui se vante, jusque-là, d’être stable et inébranlable et inquiète les grands patrons d’ici et d’ailleurs.

L’irruption des masses sur la scène politique a rapidement renversé les rapports de force dans la société. Alors que le peuple se réapproprie la rue et le débat politique, les ministres de Bedoui se cachent et font des visites éclaires pour ne pas se faire chasser, les patrons cèdent devant nos grèves et concèdent des augmentations de salaires dans certaines entreprises.

Notre mobilisation a d’ores et déjà enregistré des victoires. Elle a dégagé Bouteflika, Lamamra, Ibrahimi, Belaiz et d’autres responsables tombent l’un après l’autre. Avec notre détermination nous pouvons encore dégager tout le système. Ce système qui s’est mis au service des prédateurs et des grands patrons nationaux et internationaux, opprime les libertés de la majorité de la population et mène une offensive pour reprendre une à une les droits sociaux et les concessions démocratiques cédées aux masses sous la pression des luttes populaires et des grèves ouvrières.

Une révolte générale

Le Hirak est la révolte générale de toutes les victimes de ce système capitaliste et oppressif. C’est l’explosion du mécontentement de plus en plus grandissant de toutes les couches de la société qui est à l’origine de ce mouvement. C’est la convergence salutaire du cri de la jeunesse étouffée, des émeutes des commerçants réprimées, des manifestations des éleveurs et des petits patrons ignorées, des grèves des salariés et des émeutes populaires matraquées ou méprisées.

En effet, Si ce mouvement a éclaté suite à l’annonce de la reconduction d’un président moribond pour un 5ème mandat successif, sa matrice est beaucoup plus profonde. Ce mépris de trop n’est que le détonateur d’une révolte générale qui couvait depuis des années sous un système en crise.

Faillite du capitalisme algérien…

Le recul, en juin 2014, des prix du pétrole suite à la crise du capitalisme mondial a certes, mis à mal l’économie nationale. En revanche, ce sont les choix politiques et économiques adoptés par les décideurs qui ont accentué cette crise. La politique «patriotique» de développement de l’économie nationale, la dévaluation de la monnaie et le recours à la planche à billet, le bradage des entreprises, le gel des projets d’infrastructures, le gel des recrutements et des salaires, la nouvelle politique agricole…, dictées par les exploiteurs nationaux et les instances internationales ont engendré la concentration de la richesse entre les mains d’une poignée de patrons algériens et étrangers.

Pendant ce temps, les travailleurs voient leur pouvoir d’achat se dégringoler, les rangs de chômeurs grossissent, les petits commerçants, du formel et de l’informel, arrivent à peine à engranger de petits bénéfices quand ils ne sont pas contraints de mettre la clé sous le paillasson, les petits patrons n’ont plus de marchés pour rembourser les dettes contractées pour créer leurs entreprises, les éleveurs et les petits agriculteurs, mis à mal par l’encouragement des grands propriétaires ne parviennent plus à acheter sur le marché leurs propres produits, accaparés par les spéculateurs.

En préservant ses intérêts, Le grand patronat a pressé les travailleurs et les couches populaires et il s’est attaqué aux couches moyennes sur lesquelles s’est appuyé le régime jusque-là.

… et crise du système politique

Ces politiques antipopulaires sont de surcroit imposées par un Etat en mal de légitimité. Le discrédit grandissant des institutions et des organisations politiques pendant le règne de Boouteflika marqué, particulièrement, par la généralisation de la corruption a élargi le fossé qui existait déjà entre le pouvoir et la société.

La concentration, pendant près de 20 ans de tous les pouvoirs entre les mains de Bouteflika a plongé le système politique dans une crise de succession et de rivalités inter fractions. Alors que les différents groupes d’intérêts se disputaient le trône et cherchaient un nouvel homme providentiel, des affaires de corruption et de détournement sont divulguées au grand jour, de grands patrons qui poussaient l’Etat à plus d’austérité exhibent leur opulence et ignorent dans l’impunité les scandales qui les accablent.

Le compromis autour du 5ème mandat de Bouteflika avait révélé la profondeur de cette crise. Même si les fractions du régime, les grands patrons et les puissances étrangères convergent sur la nécessité de mener une politique capitaliste et de sévir contre les masses populaires.

Notre mouvement a exacerbé cette crise politique du régime. Cependant, ces guerres inter fractions ne sont pas de nature à consumer le système de l’intérieur. Seules notre mobilisation et notre détermination peuvent le dégager.

La force du mouvement

La jeunesse avec sa détermination avait réussi à lancer la dynamique populaire et à enrôler des manifestants de toutes les classes de la société et de tous les âges. La formidable mobilisation des étudiants ainsi que la participation massive des femmes ont renforcé le mouvement et l’intervention des travailleurs par leurs grèves l’a approfondi. C’est pourquoi nous sommes passé rapidement du «non au 5ème mandat» au «départ de ce système» qui n’offre aucun avenir à la société mais la condamne à sombrer dans la misère et le désespoir.

Par sa force, le mouvement a pu déjouer, jusque-là, les velléités de répression et il a fait avorter les manœuvres du régime qui tente de le conduire sur une voie de garage. Il a contré le poison de la division entre les populations par la reconnaissance de la diversité culturelle et linguistique du pays. Il s’est également montré indomptable face aux tentatives des politiciens de la bourgeoisie et des relais de l’impérialisme qui veulent le chevaucher pour prendre le pouvoir et servir toujours les mêmes intérêts.

Inquiétude des puissances étrangères et sympathie des peuples

Alors que les peuples de la région, d’Europe et d’Orient expriment une sympathie envers le mouvement populaire algérien, les Etats comme le Maroc, la Tunisie, L’Egypte et particulièrement les puissances étrangères s’inquiètent. Ces puissances ont surtout peur de la contagion des autres peuples par cette révolte. Elles ont raison d’avoir peur puisque notre mouvement a déjà eu son impact au Mali et au Soudan…

Contrairement à leurs politique de va-t-en-guerre habituelles (la destruction de l’Irak, de la Libye, du Mali et de la Syrie, la tentative de coup d’Etat au Vénézuela), les puissances impérialistes agissent plutôt en toute discrétion. Pour le moment, elles ne souhaitent pas déstabiliser l’Algérie. Elles veulent préserver les intérêts économiques de leurs bourgeoisies et redoutent surtout la destruction des Etats de la rive sud de la méditerranée qui constituent le rempart de l’Europe en Afrique.

C’est pour cela que les pays impérialistes soutiennent le régime algérien et préparent leurs relais à prendre la direction de notre mouvement. Face à cette solidarité internationale des brigands, nous devons leur opposer la solidarité des peuples exploités.

La dénonciation unanime des manifestants de toute ingérence étrangère, ouvre la voie pour la réédification d’une solidarité internationale des peuples et des travailleurs contre l’impérialisme et les bourgeoisies nationales.

Nous avons intérêt à transformer cet élan de sympathie internationale en une solidarité active des travailleurs et des peuples de tous les pays en général et particulièrement des pays voisins, avec qui nous avons de solides liens culturels et historiques, et des pays d’Europe où résident de nombreux travailleurs algériens.

Les travailleurs peuvent prendre la direction et offrir des perspectives au mouvement

Au-delà de cette force dont nous réjouissons, nous sommes convaincus que sans direction réellement révolutionnaire, notre mouvement risque d’être détourné comme l’a été notre guerre de libération nationale, nos révoltes de 1988 et notre printemps de 2001.

Les travailleurs ont entre les mains la force dont a grandement besoin le mouvement populaire. En plus de leur poids économique et de leur force numérique, les travailleurs sont organisés dans les entreprises. C’est à eux de montrer la voie de l’organisation démocratique pour les autres couches. En s’organisant sous leur propre drapeau, en Assemblées, dans des comités pour élire des délégués parmi leurs semblables les travailleurs peuvent envoyer le signal à l’ensemble du mouvement.

C’est ce rôle de locomotive que doivent jouer les travailleurs dans ce mouvement pour le tirer de l’avant et accroitre ses chances de vaincre contre le régime et contre les manipulateurs. C’est en prenant la direction du mouvement que les travailleurs peuvent dessiner des perspectives réellement révolutionnaires au hirak. Celle d’un mouvement qui va contester le pouvoir des grands patrons nationaux et internationaux qui sont les vrais responsables de notre misère et de notre oppression.
En dépit de la propagande des notables portée par les médias de la bourgeoisie appelant à l’union sacrée, essayant de dissuader les masses et les travailleurs de s’organiser dans leurs propres structures et défendre leurs propres revendications…, des organisations embryonnaires se constituent à la base dans certains quartiers et dans quelques entreprises.

Les mobilisations derrière les appels anonymes et les grèves organisées sauvagement traduisent la volonté des travailleurs de se battre et de s’engager en tant que classe. Cependant, aucune organisation syndicale ne se propose de jouer ce rôle. L’UGTA est complétement transformée en une institution gouvernementale et la majorité de ses sections en guichets de bureaucrates qui au mieux se limitent à la gestion des œuvres sociales. Les syndicats autonomes quant à eux, et au-delà de leur combativité aléatoire et de leur représentativité dans certains secteurs de la fonction publique, se contente de montrer sa force et ne donnent pas de sérieuses perspectives de lutte au monde du travail.

Si les travailleurs ont raison de répondre aux appels de grève de ces syndicats, ils doivent, toutefois, prendre le contrôle à la base de leurs organisations et de leur mouvement. Les travailleurs du privé appelés à se joindre à leurs camarades dans la lutte sous le même drapeau, doivent créer, aussi, des organisations démocratiques, combatives et représentatives de leurs intérêts. C’est ainsi qu’ils peuvent envisager une intervention collective par la grève générale.

Proclamation

C’est dans cette perspective que nous, militants et militantes de la Voie Ouvrière pour le Socialisme, comptons nous engager. Nous sommes conscients que les illusions d’un capitalisme et de la démocratie abstraite restent très fortes en dépit de la crise de ce système au niveau mondial et malgré les démonstrations répressives que font ces Etats qui passent pour les chantres de la démocratie.

Nous sommes conscients que le rêve socialiste trahi par les bureaucraties socialistes, déformé par les nationalistes et dénigré par les politiciens de la bourgeoisie ne constitue pas l’idéal des masses populaire aujourd’hui et que l’abolition de l’exploitation et l’oppression de l’homme par l’homme, l’égalité des sexes et l’unité des peuples sont perçues aujourd’hui comme des utopies irréalisables quand elles ne sont pas attaquées au nom du conservatisme qui continue de distiller dans notre pays et dans le monde son venin raciste et sexiste pour nous diviser afin de garantir le règne de leurs maîtres.

Nous demeurons convaincus que le socialisme est l’avenir de l’humanité. C’est la seule perspective qui mettra fin à l’anarchie du capitalisme et empêchera notre monde de sombrer dans la barbarie.

Nous sommes, aussi, conscients que les travailleurs algériens qui avaient ébauché dès les années 1920 la lutte contre le colonialisme, lancé la révolte de 1988 et qui jouent un rôle dans le mouvement en cours n’ont pas réussi à se constituer en tant que classe sociale dirigeante. Ils ont toujours cédé la direction de leurs nombreuses luttes aux politiciens de la bourgeoisie et aux bureaucrates qui se sont retournés contre eux et contre les couches défavorisées de la société.

Nous sommes Toujours convaincus que les travailleurs, de par leur place au cœur de l’économie, constituent la seule classe homogène qui dispose de la force nécessaire et qui a intérêt à changer radicalement le système politique, économique et sociale. C’est cette classe qui peut engager la construction d’un nouveau monde débarrassé de l’exploitation, de la misère, des guerres et de l’autoritarisme.

Nous sommes, également, convaincus qu’une direction révolutionnaire est indispensable pour espérer une victoire définitive des travailleurs et des masses populaires. Par la proclamation de notre organisation, nous espérons et souhaitons contribuer à la construction du parti révolutionnaire des travailleurs et des opprimés.

Alger, le 19.04.2019

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